Pour rencontrer Dominique, il faut se lever tôt. Sa journée débute aux alentours de 4h du matin.
Crieur depuis 36 ans sur le port de St-Jean-de-Luz / Ciboure, Dominique a vu évoluer le métier
et a évolué avec lui.
Le crieur est la personne qui organise, gère et pilote la vente du poisson frais à la criée. Une fois débarqué,
le poisson est pesé et mis en lots dédiés à la vente. Ce travail s’effectue la nuit et doit être terminé vers 4h.
Chaque lot est identifié par un code barre qui sert au crieur pour la génération d’un catalogue papier récapitulatif.
C’est la première mission de Dominique.
Du bâton au clavier
En effet, depuis 1996 et l’entrée de l’informatique à la criée, les méthodes de ventes ont beaucoup changé. «Le métier de crieur a beaucoup évolué avec l’arrivée de l’informatique. Il a fallu changer quelques habitudes mais on y a gagné en temps et traçabilité.» Avant, la vente à la criée se faisait à la voix. « 10 à 20 acheteurs se regroupaient autour des lots de poisson en vente. C’est le crieur qui menait la vente, au bâton. Evidemment, c’était beaucoup plus long et beaucoup plus fatiguant, il fallait crier pendant 2 ou 3 heures. Sans parler des discussions animées voire des litiges à trancher. »
Dorénavant, la vente en elle-même se fait dans un amphithéâtre avec écran géant et pupitres individuels. « Bien sûr, au début il y a eu quelques bugs mais tout le monde a maintenant adhéré à ce nouveau mode de vente. » Car l’arrivée de l’informatique a modifié les habitudes mais aussi les horaires de chacun.
Pour les pêcheurs comme pour les mareyeurs et poissonniers, l’horaire a été avancé. « Les pêcheurs doivent débarquer leur poisson plus tôt pour que le listing de tout le poisson du jour soit prêt avant l’arrivée des premiers acheteurs. Les mareyeurs ont alors un créneau de 2h pour venir voir les lots de poissons. A 6h, je débute la vente. »
Traçabilité, contrôle et gain de temps
De sa cabine, Dominique pilote la vente. Les mareyeurs devant leurs écrans la suivent avec attention. Ils ont chacun un boîtier à disposition pour se positionner sur les lots qui les intéressent. « L’amphi est plutôt silencieux aujourd’hui mais ce n’est pas tous les jours si calme. S’ils ne veulent pas rater de vente, les mareyeurs doivent rester concentrés. Ça va très vite. » En effet, les lots défilent très vite sur les écrans, et le prix encore plus ; à la baisse suite au lancement de l’enchère par Dominique, puis à la hausse si par cas deux acheteurs se positionnent sur la marchandise dans la même fraction de seconde.
L’achat est également devenu anonyme : « Les mareyeurs ne savent pas ce que font leurs concurrents.» Dominique note un autre grand changement « Ce n’est plus moi qui adjuge, c’est la machine, ce qui a un peu déshumanisé la vente. » Par contre, l’informatique facilite la traçabilité et le contrôle des achats des lots de poissons. « Dès la fin de la vente, le mareyeur repart avec ses achats et son bordereau récapitulatif, espèce par espèce. Il peut contrôler avant de charger sa marchandise. Les bordereaux qu’il fallait venir chercher le lendemain, c’est terminé. »
Le métier de crieur porte maintenant mal son nom mais Dominique l’apprécie toujours autant. Avec l’informatique, il a gagné en efficacité et en traçabilité. « Il y a moins de proximité avec les acheteurs, mais, globalement, c’est une bonne évolution. »